Gajah Mada était le plus grand premier ministre de l’empire Majapahit responsable de l’unification de l’archipel indonésien au 13e siècle. Il est dit que son masque, représentation de lui-même offert aux rois balinais au 14e siècle, possède des pouvoirs magiques capables d’exaucer n’importe quel vœu.
Pour comprendre pourquoi le masque de Gajah Mada s’est retrouvé à Bali, il faut remonter au 8e siècle, bien avant l’avènement de l’empire Majapahit. A cette époque la dynastie Warmadewa régnait sur les basses terres de Bali, alors que les Bali Aga vivaient dans les montagnes. Les Warmadewa entretenaient des relations très cordiales avec les rois de Java.
C’est ainsi que Ratu Prabu Udayana, le roi Warmadewa connu pour avoir mis en place le système d’irrigation à Bali, se maria avec Mahendradatta venue de Java. Leur union donna naissance à Airlangga, « celui qui traversa l’eau », qui régna plus tard sur le royaume javanais de Kahuripan à l’est de l’île. Ce sont les descendants d’Airlangga qui formèrent ensuite l’empire Majapahit.
Au 14e siècle, alors que Majapahit, sous l’impulsion de son premier ministre Gajah Mada, tentait d’imposer son hégémonie sur Bali, certains habitants se révoltèrent et l’île entra en guerre civile. Gajah Mada, stratège très habile, envoya alors les descendants d’Airlangga à Bali. Il pensait que les Balinais accepteraient ces descendants lointains des rois de Bali comme leurs dirigeants. Et pour apporter le calme, Gajah Mada offrit aux Balinais son masque, comme symbole de l’unité de l’archipel et comme une représentation de lui-même.
C’est ainsi que depuis plus de 600 ans le masque de Gajah Mada est précieusement conservé dans un petit temple situé à Blabatuh dans la région de Gianyar. Tous les deux ans, il est ramené à la vie pour unir et harmoniser le monde lors d’une danse sacrée que seul un homme soigneusement choisi peut exécuter après avoir suivi une série de rituels purificateurs.
A l’origine destiné à apporter la paix à Bali, le pouvoir du masque a augmenté au cours des siècles et il serait capable désormais de se transformer. Ainsi le masque pourrait s’ajuster à la physionomie de celui qui a l’honneur de le porter, devenant plus ou moins grand selon la taille du danseur. Selon certains, il changerait également parfois de couleur, passant d’un jaune éclatant à un rouge très vif.
Pour maintenir sa magie et son caractère sacré, le masque n’est sorti qu’à de très rares occasions et il est interdit de le photographier, bien que quelques hauts dirigeants adeptes de sciences occultes et de pratiques ésotériques aient été parfois autorisés à le prendre en main et même à l’emprunter comme ce fut le cas du président Suharto qui l’emporta à plusieurs reprises à Jakarta.